Girl - Body heat
Bande Dessinée / Critique - écrit par Maixent, le 01/11/2010 (Tags : eur girl taylor kevin heat livres body
Il n'est pas aisé de réaliser un bon album de sexe crade sans sombrer dans la facilité, c'est pourtant le cas ici. Une réussite du genre.
Selon l'Encyclopédie de la bande dessinée érotique de Henri Filippini, Girl est une héroïne créée par Kevin J. Taylor en 1990, un corps fragile avec néanmoins des seins monstrueux, une peau d'ébène (ce qui n'est pas frappant dans l'album présent) et passionnée par le paranormal. D'où une série mélangeant un érotisme violent entrecoupé de scènes mystiques où l'héroïne se retrouve catapultée dans un monde peuplé d'anges et de démons. Mais ce n'est pas vraiment le propos en ce qui concerne cet album réunissant onze histoires de tailles variables, qui présentent plutôt l'univers de Girl, en se concentrant également sur son entourage, que ce soit Blue l'étalon ou Jill l'étudiante. Il y a bien deux histoires à consonance mystique, l'une avec trois membres du zodiaque, le lion, le bélier, et bien sûr, le taureau ; l'autre mettant en scène un centaure dans un univers irréel par une nuit de pleine lune. Une troisième histoire est plutôt parodique, où l'on retrouve Superman, Batman et Loïs Lane qui ne sont pas du tout occupés à sauver le monde. Mais le reste de l'album est plutôt ancré dans la réalité si ce n'est les attributs aussi bien des hommes que des femmes qui ne correspondent à rien de réel.
Journée chargée pour GirlLa démarche de Kevin J. Taylor est intéressante en cela qu'il fait partie des précurseurs de la bd pornographique américaine. En effet, de son propre aveu, mis à part l'œuvre de Robert Crumb ou des albums comme Omaha (réédité actuellement chez Tabou) on ne trouvait aux Etats-Unis (du moins en librairie) que des œuvres classiques ou gentiment érotiques comme Little Annie Fanny contrairement à ce qui se faisait en Europe. Kevin J. Taylor y voit alors l'opportunité d'un marché dans lequel il s'engouffre à fond avec Girl et est très vite reconnu par ses pairs et mentors outre-Atlantique, que ce soit
La redéfinition du bras d'enfant Moebius, Serpieri ou Liberatore. De nos jours, la production pornographique a pris de l'essor et il est aisé de trouver des bandes dessinées hard voire très hard, notamment dans la littérature gay et des auteurs comme Tagame, mais la réelle force de Kevin J. Taylor, en plus de son aspect précurseur sont l'utilisation d'un scénario efficace et de trouvailles narratives de qualité qui se rapprochent de la bande dessinée traditionnelle, comme l'utilisation de « polaroïds » qui servent de bornes aux cases et de prétexte à voyeurisme. On ressent dans cet album une véritable cohérence et la capacité de l'auteur à faire du porno par choix et non pas par nécessité car il serait incapable de penser une histoire ou de réaliser un bon dessin.
Ainsi, en plus du côté excitant, malsain, sale, violent, et caetera, bref, tout ce qu'on demande à ce genre de littérature, on se laisse enivrer de bout en bout par le choix des plans, le découpage des cases ou la lettre faussement ingénue d'une jeune actrice prometteuse à son petit ami. Il ne faut pas oublier quand même que l'on a à faire à un album dans lequel les filles se font remplir par tous les orifices avec des engins tous plus volumineux les uns que les autres dans des attitudes de soumission et de plaisir mêlés. Même s'il s'agit d'un album de qualité, ça fait mal, c'est sans concessions et il ne faut pas s'attendre à beaucoup de poésie.