9.5/10Dark Crystal

/ Critique - écrit par Lestat, le 04/10/2004
Notre verdict : 9.5/10 - Féerique et rare (Fiche technique)

Tags : crystal dark film henson jim series netflix

It's time to play the music
It's time to light the lights
It's time to meet the Muppets on the Muppet Show tonight.

1976 : une bombe éclate sur les petites lucarnes et s'apprête à conquérir le monde. 235 millions de téléspectateurs, l'une des émissions les plus suivies dans le monde : le célèbre Muppets Show ! Piggy la Cochonne, Kermit la Grenouille, les terribles petits vieux Statler et Waldorf... de ce spectacle musical mêlant marionnettes et vrais personnalités, Peter Jackson tira Meet the Feebles, l'un de ses meilleurs films pré-Seigneur des Anneaux, mais aussi l'un de ses plus trashs. En France, on en profite pour faire le Bébette Show. Non contente d'être culte, l'émission cartonne. Son créateur ? Un Américain barbu du nom de Jim Henson. Au même titre que Ray Harryhausen, son nom deviendra une référence dans tout ce qui touche aux effets spéciaux par animation. Dans le cas de Jim Henson, les marionnettes et animatroniques. Au delà de ses délirants Muppets, il mit également son talent au service de la Fantasy, et à son propre compte, toujours accompagné de son fidèle Frank Oz : en résultera ce très beau Dark Crystal et le plutôt kitsh Labyrinth.

Durant l'âge des Miracles, sur une terre qui n'est pas la notre, deux peuples en déclin attendent une prophétie. Dans la crainte, les cruels Skeksis, gardiens jaloux du mystérieux mais abîmé Cristal Sombre. Dans l'espérance, les bons Mystics, tribu sage et pacifique. Au milieu, le jeune Jen, unique descendant de la race des Gelflings élevé par les Mystiques, le seul à pouvoir retrouver l'éclat de cristal manquant et accomplir le miracle. Tel est ce qui est écrit...

Tout amateurs de Fantasy aura retrouvé ses marques dans cette bribe d'histoire, lorgnant vers la quête de l'Anneau. Intégralement conçu en animations et marionnettes, Dark Crystal débute comme une histoire pour enfants, au manichéisme bien établi : des gentils Mystiques, le mignon Gelfling et les moches et cradingues Skeksis. Pourtant au fur et à mesure du film, Dark Crystal révèle son intelligence, une profondeur insoupçonnée et n'en devient que plus adulte. Les nuances s'estompent, au fil d'indices lâchées ici et là, jusqu'au fin mot de l'histoire, une belle pirouette qui confirme en beauté que bien et mal sont étroitement liés. Dénouement surprenant amenant une bonne dose de mythologie voir de philosophie à Dark Crystal qui pourtant ne manquait déjà pas de charmes et de moyens d'évasion.

Car Dark Crystal, c'est avant tout un univers à part et réellement magique. A commencer par son bestiaire étonnant, où l'humain n'a pas sa place : ici Jim Henson ne commet pas l'erreur de Labyrinth, où il incorporait de vrais acteurs (David Bowie, Jennifer Connely). Créatures aquatiques, insectes géantes, étranges mammifères, races éteintes...tout ce petit monde animatronique évoluant dans un cadre luxuriant et mystérieux de plantes carnivores et fleurs vivantes...Et le tout magnifiquement animé. Il y a bien quelques mouvements un peu raides, mais dans l'ensemble, Dark Crystal est un film bluffant, à tout points de vue. Un monde à la vision immense surpassant même Tolkien sur son propre terrain, aux effets spéciaux superbes, doté d'une intrigue touffue, et au delà de la claque visuelle, un travail soigné de réalisation. C'est rythmé, ça virevolte, on est loin, très loin des réputations faciles et saccadées des films de marionnettes.

Dark Crystal est une date dans l'histoire de l'animation et de la Fantasy au cinéma. Un film qui commence tel un joli conte, prend soudain son envol pour enfin atteindre les cimes, celles réservées aux classiques du genre. Plus de vingt ans plus tard, il s'y trouve toujours et n'est pas prêt d'en descendre. Dark Crystal malgré ses richesses, n'aura pas emballé les foules et reste toujours en retrait par rapport aux productions Fantasy plus traditionnelles. Là où le film était enchanteur, il n'en devient que plus humble. Autant dire qu'à ce moment, on frise le chef d'oeuvre...